Grèce 2008

Publié le 13 Décembre 2012




Communiqué à mes parents

 

Je sais que je vous dois beaucoup. Vous m’avez donné naissance, vous m’avez nourrie et abreuvée, et vous m’avez élevée. Vous m’avez même aimée. Ou plutôt vous dites que vous m’avez aimée. Car la réalité est un peu différente.

 Vous m’avez amenée dans un monde où vous étiez forcés de me laisser quelque part chaque jour, et de partir à vos occupations et votre travail. Vous m’avez mise au monde, puis vous avez toujours cherché un endroit où me jeter. Vous m’avez amenée à l’école et, comme si ce n’était pas suffisant, vous m’avez fait suivre toute une série de cours de soutien, et m’avez inculqué l’anxiété pour mon avenir incertain. Si mon futur est si incertain, si vous avez fait de cette planète un endroit si dangereux où vivre, pourquoi alors m’avoir amenée dans ce monde ? En quoi consiste ma vie ? Deux heures par jour de télé et de jeux vidéo ?

 Je veux découvrir le monde, ouvrir mes ailes, m’envoler et tout observer en l’espace d’un instant. Je veux sortir et rencontrer des gens, jouer et m’amuser, me sentir heureuse et ne pas me soucier de si j’ai cours demain et que je n’ai pas fait mes devoirs. Je veux rêver d’un monde où ils ne chercheront pas de lieu où me stocker, où ils n’auront pas à travailler en permanence, où l’on ne craindrait pas de rencontrer de nouvelles personnes, où le futur ne m’effraiera pas, et où il n’y aura ni maîtres ni esclaves.

 Je vois votre misère mais je ne m’y suis pas habituée, et je ne veux pas m’y habituer. Vous ne me ferez pas baisser les bras juste parce que vous avez baissé les vôtres. Je ne veux être ni l’esclave ni le chef de personne. Je veux que vous me laissiez tranquille.

 Je n’ai pas peur de ces chiens de garde en uniforme dont vous avez peur. Vous voyez de l’ordre et de la sécurité en eux. Cessez de vous moquer de moi, car je sais très bien que cet ordre n’est qu’hypocrisie ; quant à la sécurité publique, eux-mêmes sont le plus grand des dangers.

 Ils sont des symboles du Pouvoir, de votre propre autorité, de l’autorité des profs, des politiciens, de tous les adultes qui vivent ainsi. Vous êtes ceux qui ont appris à vivre ainsi, pas moi. S’ils veulent me chercher des noises, ils vont voir. Ils n’ont aucune chance face à moi, qu’ils gardent bien ça en tête. Je suis en colère et dangereuse. Et nous sommes nombreux, nous somme partout, on peut même nous trouver dans les foyers des meurtriers. Partout où ils sont, ils ne peuvent pas se cacher de nous. D’une façon ou d’une autre nous sommes ceux qui resteront debout, pas eux.

 Ne soyez pas fâchés contre moi, je fais seulement ce que vous m’avez appris. Vous dîtes que cette révolte n’est que désordre et destruction. Et maintenant que je grandis, désordre et destruction sont tout ce que vous obtiendrez de moi.

 Je vous aime. À ma façon toute particulière, mais je vous aime vraiment.

 Mais je dois construire mon propre monde afin de vivre une vie libre, et pour cela je dois détruire le votre. C’est la chose la plus importante à mes yeux. Pour le dire avec vos mots : c’est mon travail.


texte écrit par une lycéenne durant les émeutes de décembre 2008


Source  :  http://fr.contrainfo.espiv.net/


 

 

Rédigé par hobo-lullaby

Publié dans #Liberté

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A
<br /> Désolée j'insiste, il n'y a pas seulement cette jeune fille mais un bon nombre d'autres qui courent au casse pipe sans aucuns résultats positifs mais plus souvent leur propre destruction. J'en<br /> croise, je peux mettre des visages, pour lesquels j'ai de la sympathie, c'est pourquoi j'insiste, c'est un problème qui me tient à coeur depuis un bon moment et j'ai aussi mes propres souvenirs<br /> d'une autre époque.<br /> <br /> <br /> Quand j'ai posté le commentaire, je n'avais pas encore lu le texte qui avait motivé sa publication sur contrainfo. Depuis je l'ai même publié, parce que cette question de violence est importante.<br /> Ce texte formule parfaitement ce qui fait l'objet de mon inquiétude, mais je restais prudente parce que je n'observais que de loin, et ce que dit ce compagnon reprend exactement les mises en<br /> garde que j'aurais envie de faire. Et lui l'a vécu de l'intérieur. Il est donc mieux placé sue moi pour critiquer, mais je le rejois tout à fait.<br /> <br /> <br /> Le texte est iciLégitime violence ?<br /> <br /> <br /> Je lis la lettre de la jeune fille et je reconnais le ton commun a un certain type de luttes actuelles : l'anarchisme insurrectionnel... ce qui sera confirmé par la suite. Déjà que je puisse<br /> reconnaître au ton de la lettre le courant auquel elle appartient n'en fait plus quelque chose de tout à fait spontané. Ce courant est un courant international, mais très, très limité en nombre<br /> et retentissement en chaque lieu. Ce que met en évidence le compagnon qui se retire: des jeunes pratiquent des actions de sabotages et de destructions qui ne produisent, ni aucune avancée de<br /> changement, ni aucun dommages réel au système, mais qui par contre  conduisent les auteurs en prison parfois pour de longues peines, et plusieurs sont morts ou mutilés à cause de leurs<br /> propres bombes (y compris en France). Cela se passe dans de nombreux pays et ils sont fort connectés entre eux. Ils s'imaginent être l'avant garde de l'avant garde,alors qu'ils sont seulement à<br /> côté de leur pompes, et stratégiquement nuls,<br /> <br /> <br /> Le but initial, permettre d'ouvrir et protéger des espace dans lesquels ce monde nouveau est possible, est complètement perdu de vue au profit d'une destruction aveugle et souvent la destruction<br /> des auteurs fait partie intégrante de ce processus.<br /> <br /> <br /> La question qui se pose est alors "Qui a intérêt à ce que des jeunes qui ont ce potentiel de révolte radicale courent droit dans le mur, ou derrière ceux de la prison ? " "Qui a intérêt a créer<br /> des précédents qui permettront de discréditer toute action radicale ultérieure en les assimilant à des actions nihilistes, terroristes ou de violence gratuite"<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Une phrase lue dans des textes zapatistes : "Il faut beaucoup d'amour pour faire une révolution"C'est aussi une grande part de mon respect pour Chavez et le peuple vénézuelien,c'est cette<br /> relation d'amour réciproque.<br /> <br /> <br />  Et donc voilà ma motivation : il y a parmi nous des jeunes dont la révolte est sincère et justifiée mais que des salopards utilisent pourles conduire à leur propre destruction ou à la case<br /> prison, ce dont le seul bénéficiaire est le système qu'il croient combattre.<br /> <br /> <br /> Où est-elle aujourd'hui cette jeune fille,et si elle est en prison... qui va lui écrire ?<br /> <br /> <br /> Alors oui elle est libre,et même mûre, pour aller droit au casse-pipe...<br /> <br /> <br /> Et moi cela me fait de la peine.<br /> <br /> <br /> Anne<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br />
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H
<br /> <br /> Bonjour Anne<br /> <br /> <br /> Merci d'insister pour nous faire réfléchir aux limites de la légitime violence. Tu poses la bonne question, qui a interet à manipuler la fougue de ces jeunes ? La réponse réside peut être dans<br /> l'art de la guerre de SUN TZU  <br /> « Qui connaît son ennemi comme il se connaît, en cent combats ne sera point défait. Qui se connaît mais ne connaît pas l'ennemi sera victorieux une fois sur deux. Que dire de ceux qui ne se<br /> connaissent pas plus que leurs ennemis ? »<br /> <br /> <br /> <br /> On peut aussi rapprocher cette citation de la stratègie des désobéissants.<br /> <br /> <br /> <br /> Ce qui est navrant, c'est de se dire que l'homme est un être intelligent ou peut être trop. J'aime beaucoup cette phrase "Il faut beaucoup d'amour pour faire une révolution" C'est sans doute une<br /> clé, car la prise de conscience collective ne peut que passer par là.<br /> <br /> <br /> <br /> Bises<br /> <br /> <br /> <br /> Serge<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> Bonsoir Serge, Depuis que j'ai lu cette lettre - et les commentaires, quelque chose me tracasse. Elle m'a fait froid dans le dos cette lettre.<br /> <br /> <br /> Je la retrouve aujourd'hui dans un autre contexte, sur le site Contra Info<br /> <br /> <br /> Et cela confirme mon sentiment de départ. C'est la lettre de quelqu'un qui entre en guerre. Ce n'est pas la révolte de 68 et après, qui était de la rigolade à côté. Cela ressemble plus au genre<br /> de détermination qu'aurait pu avoir une jeune fille qui dans les années 40 se prépare à résister aux nazis, parce que le contexte se rapproche plus de celui-là... Sauf que ... je ne sais pas ...<br /> la question de la lutte violente, que prône le site sur laquelle je l'ai retrouvée, comme la mène certains qui se disent anarchistes et utilisent de grands mots, mais fort stéréotypés en fait<br /> pour justifier leur action, j'ai plus le sentiment de me retrouver en face de staliniens que d'anarchistes ! ... cette violence destructrice m'interpelle, pas par la violence en tant que telle,<br /> les résistants de la seconde guerre mondiale ont usés de violence et personne ne le leur reproche. Mais parce qu'il me semble qu'ils se trompent de cible et de tempo. Et qu'ils risquent de payer<br /> très cher cette erreur.<br /> <br /> <br /> Le déclic s'est fait, je sais ce que cette lettre évoque pour moi, des séquences de la révolution culturelle en Chine.<br /> <br /> <br /> Mais ils évoquent aussi certains discours de groupes radicaux des années 70 qui ont compris ou appris après,  qu'ils avaient été infiltrés (ou même crées) et manipulés dans le cadre du<br /> projet gladio pour servir de levier dans la stratégie de la tension.<br /> <br /> <br /> Je suis certaine que de tels groupes sont composés comme ce fut le cas pour leurs aînés de personnes sincères et dévouées à une cause qu"elles croient juste mais dont la révolte est canalisée par<br /> d'autres vers des buts qui leurs sont cachés, par quelques uns dont c'est le rôle.<br /> <br /> <br /> Et souvent le premier des conditionnements que pratiquent les manipulateurs, c'est d'encourager à rompre les liens avec les proches, famille, amis... je l'ai vu faire quand j'étais ado et je ne<br /> doute pas que des méthodes similaires soient employées aujourd'hui.<br /> <br /> <br /> J'ai pas mis beaucoup de points d'interrogations mais c'est plein de questions tout cela...<br /> <br /> <br /> Une chose dont je suis certaine, c'est que si des jeunes ont aujourd'hui à prendre de telles décisions, choix de la manière dont ils vont entrer en guerre, cela signe l'échec de ceux qui les ont<br /> précédés. Triste liberté.<br /> <br /> <br /> Je suis triste pour cette jeune fille, si jeune et déjà si dure, et qui n'a pas vraiment le choix parce que le monde dans lequel elle a grandit était dur et celui qui vient menace d'être pire<br /> encore, en Grèce cela ne fait aucun doute. Même si cela tenait la route leur programme d'austérité, la sortie aurait lieu quand ces jeune seraient grand-parents...et cela ne tient pas la route...<br /> <br /> <br /> Je ne puis le dire autrement, la partie de la jeunesse qui si elle veut défendre son droit vivre sans hériter, des erreurs et dettes du passé, va affronter des polices formées aux méthodes<br /> pratiquées pendant des décennies en Amérique Latine, en Irak, en Afghanistan,( le nom du programme en France c'est Opération Scorpion, pour l'Europe les troupes spéciales transnationales<br /> d'Eurogenfor), à côté de cela les CRS d'antant,c'étaient  juste des bons gros nounours chargés de jouer les épouvantails.<br /> <br /> <br /> Bisous<br /> <br /> <br /> Anne<br />
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H
<br /> <br /> Bonjour Anne<br /> <br /> <br /> Ce qui m'a plu dans cette lettre, c'est le rejet de notre socièté par une jeune femme de 18 ans, c'est à dire par un regard "neuf".<br /> <br /> <br /> Une entrée en guerre ?  Certainement. Ce texte a été écrit en pleine période d'émeute, dans un contexte violent, oû garder la tête froide devient un exercice de style.<br /> <br /> <br /> Ce que tu écrit sur la manipulation est très interessant car au delà de nos engagements en fonction de nos sensibilités, de nos expériences, de nos lectures et de notre entourage, se pose à un<br /> moment ou un autre le problème de l'action. J'ai toujours été effrayé par l'effet de meute, et on retrouve ce phénomène dans chaque mouvement encadré. Les dérives deviennent dès lors fréquentes,<br /> la manipulation en est une.<br /> <br /> <br /> Le pouvoir en place a appris depuis longtemps à perfectionner ses armes, l'infiltration des mouvements en est bien sur une, d'autant plus efficace que le mouvement est inexpérimenté. On en arrive<br /> donc à une espèce de paradoxe : utiliser des armes liberticides pour defendre des idées libertaires. Je ne parle pas d'action de "légitime défense" comme tu l'as souligné en parlant des<br /> résistants de la deuxième guerre mondiale.  <br /> <br /> <br /> Alors oui ce monde est pourri, oui il faut en changer, et cette jeune fille a raison de crier sa révolte, mais un mouvement spontané, sans réel cartel à sa tête, avec une prise de conscience<br /> collective et s'appuyant sur des initiatives communautaires et autogestionnaires n'est il pas le meilleur moyen de changer les choses ?  Utopie diront certains, joli mot répondrons d'autres<br /> !<br /> <br /> <br /> Bises<br /> <br /> <br /> Serge<br /> <br /> <br /> <br />
F
<br /> Ni dieu ni maître..<br /> <br /> <br /> ce que j'ai aussi appris toute seule il y a fort longtemps...<br /> <br /> <br /> Ravie quand la jeunesse prend conscience que son destin lui appartient.<br /> <br /> <br /> Bises Serge<br />
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H
<br /> <br /> Bonsoir Fanfan<br /> <br /> <br /> Je suis d'accord avec toi, le destin doit se prendre en main le plus tôt possible ... Après, c'est trop tard !<br /> <br /> <br /> Bises<br /> <br /> <br /> Serge <br /> <br /> <br /> <br />
A
<br />  <br /> <br /> <br /> Génial, moi j'en ai un sur deux qui à tout compris et depuis tout jeune, beau "travail" Serge !! De toute façons c'est toujours dur d'être parents, donner l'exemple, respecter pour l'être sois<br /> même et transmettre nos vrais valeurs et la peur on l'a toujours alors !Vive la liberté, sont courageux et sincères les jeunes !!<br /> <br /> <br /> Amicalement, bonne soirée <br />
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H
<br /> <br /> Bonsoir Adam<br /> <br /> <br /> Je ne sais si la Liberté s'enseigne, mais sa découverte est un moment privilègié dans une vie<br /> <br /> <br /> Bonne Soirée<br /> <br /> <br /> Serge<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Bonsoir Serge,<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> C'est la preuve d'une grande maturité, de celle des jeunes que l'on rencontre dans les mouvements de révolte. Certes ils ne sont pas nombreux mais une petite poignée de cette trempe et c'est<br /> 300/400 jeunes qu'ils entrainent derrière eux dans les luttes.<br /> <br /> <br /> Je retrouve beaucoup de mes valeurs dans ce texte, l'anticonformisme face à l'éducation et à la soumission au pouvoir que j'ai toujours refusé et pour tout te dire même si je suis rentrée dans le<br /> rang pour mes gamins, j'ai eu beaucoup de mal à accepter le système que l'on me faisait prendre pour les éduquer. Ce n'était pas simple pour eux car d'un côté il fallait quand même se plier et de<br /> l'autre il y avait une mère qui même sans le dire était en rejet de cela. J'ai donc deux enfants marginalisés  sur 4 à cause de ma façon d'être......mais j'ai confiance en eux, je sais<br /> qu'ils s'en sortiront car ils en ont le potentiel(même si j'en tremble parfois)<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Bisous et bonne soirée<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> caro<br />
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H
<br /> <br /> Bonsoir Caro<br /> <br /> <br /> L'éducation, vaste sujet dont la confiance est lune base et l'anticonformisme une clé<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Bises<br /> <br /> <br /> Serge<br /> <br /> <br /> <br />