A qui de droit : mon nom est… qui s’en soucie ?
La dignité, la résistance, la résilience… ils m’ont tous conduite nulle part.
Ils ne sont que des gribouillages sur les murs de mon histoire.
Ils sont des rêves par des gens avalés par la gloutonnerie.
Ils sont la cause et l’effet, les mensonges et les regrets, pour effacer et oublier.
La honte sur ceux qui me liront puis s’en iront faire demi-tour.
Est-ce moi qui ait fait l’histoire, le passé et le présent, aujourd’hui demain…
partout ?
Je tiens le mot, et la lutte contre l’obscurité et le désespoir, venant de ces
grottes de gens blessés, mes ancêtres.. je les entends encore, aiguisés et clairs.
Je tiens l’existence, sur les papiers du bureau, sur les visages dans la foule,
sur les tombeaux des martyrs.
Je tiens la vie dans les miettes de pain, les bougies,
les livres sur tune étagère rouillée.
Je tiens le conflit avec le rire, avec ces enfants qui m’ont appris
à lutter par un sourire et tuer par une prière.
Je tiens la justice par la mémoire, avec un poème brisé,
un exil et un Etat de nulle part.
Je tiens la mort avec l’éternité, un rêve éternel, un amour éternel,
une lutte éternelle, un but, une cause… Je ne sais pas le désespoir.
Je suis le subconscient de chaque humain. Vous ne pourrez pas manger, vous
ne pourrez pas dormir, vous ne pourrez pas rêver, je vous hanterai… vous qui
avez volé.. volé mon propre monde, je vivrai pour ne pas oublier.
Sur ma terre, vous avez volé le fruit, le travail d’un jour, les jours d’un jeûne,
le temps prendra des notes, l’endroit sera témoin.
Quand nos enfants le matin se réveillent, quand du lait de leur bouche est pris,
quand des symphonies de larmes sont secouées, quand nos mères et pères
se noient impuissants contre leurs bébés, quand notre bougie la nuit a fondu,
quand nos yeux gonflés et fatigués, dans les champs d’une nuit sans fin, crient
le sang et perdent la vue, quand nos corps au froid deviennent plus faibles,
quand la seule chaleur qui vient est celle des personnes âgées que vous avez
cassées, quand vous vous asseyez dans votre refuge doré…
asseyez-vous et prenez note :
Prenez note : nos stylos oscillent, dans toutes les directions. Ils insistent,
persistent et crachent les balles de votre oppression.
Prenez note : nos journeaux sont remplis des actes de vos intentions minables,
de vos crimes quotidiens contre notre existence, de vos menaces délirantes et
de vos tortures atroces.
Prenez note : nos langues vivront pour raconter, les contes de votre racisme, de
votre monde permettant l’apartheid et de votre haine ignorante.
Prenez note : les enfants grandiront, ils sont les graines de vos oppressions
murmurées.
Prenez note : nous, les minables, les étudiants de ce conflit, monterons et
monterons au-dessus de votre cruauté, au-dessus de vos mensonges, de votre
fausse solidarité « de fraternité », nous monterons et monterons avec les flammes
de notre volonté passionnée de vivre, sur notre terre, avec notre peuple, contre
tous vos pièges et labyrinthes mortels. Nous reviendrons vers nos maisons,
contre votre volonté, contre vos balles et vos tanks, contre vos pots-de-vo, et
vos grades, contre toutes vos tentatives de faire de nous des bêtes, des sauvages
contre votre soi-disant « liberté ».
Prenez note : ô vous les cadavres serviles, vous les dirigeants endormis et les
masses distraites !
Natalie Abou Shakra, habitante de Gaza, le 10 janvier 2009