Sunday Music
Publié le 19 Avril 2015
Liza Kalverage était une activiste, qui a eu en particulier un grand investissement contre la guerre du Vietnam. Le 25 mai 1965, avec deux autres amies, elle avait bloqué le départ d’un navire qui devait livrer quelques tonnes de Napalm à l’armée américaine. Dans leurs plus beaux habits du dimanche, elles s’étaient tenues sur la plateforme menant au bateau, refusant d’en bouger. Il avait fallu les emmener de force, et elles avaient été arrêtées.
À son procès, elle avait raconté son histoire, et ce sont de ses propres mots que Pete Seeger a tiré magnifique chanson ici proposée. Elle avait expliqué à ses juges comment elle avait été amenée à prendre conscience des questions de responsabilité individuelle et collective. Née en 1923 à Nurenberg, elle avait grandi dans l’Allemagne nazie. Toute jeune, à la fin de la guerre, elle avait rencontré un militaire américain qui se trouvait là en garnison, et qui devait devenir le compagnon de toute une vie, Bernie Kalverage. Mais épouser un militaire américain, en 1945, pour une jeune allemande, n’allait pas de soi : elle avait été longuement interrogée sur son attitude passée à l’époque nazie. Elle n’était qu’une enfant, puis une adolescente quand ce système avait été mis en place. On lui avait alors demandé ce qu’avait été l’attitude de ses parents, et c’est là une question à laquelle elle ne savait pas répondre.
Devenue américaine, elle n’avait pas oublié la leçon. Elle savait qu’on ne doit pas assister sans réagir aux crimes qui se commettent. Elle savait qu’à défaut, on encourrait une responsabilité collective. Et que ses enfants sauraient quoi répondre lorsqu’on leur demanderait ce que faisait leur mère lorsque…
Liza Kalverage est décédée le 8 mars 2009, toujours militante. Cinq enfants, six petits-enfants, deux arrière-petits-enfants sauront répondre à la question.
Mon nom est Lisa Kalvelage
Mon nom est Lisa Kalvelage, je suis né à Nuremberg
Et quand les procès se sont tenus là il y a dix-neuf ans
Il m'a semblé ridicule de tenir toute une nation responsable
Pour les horreurs que le monde a subies
Quelques temps plus tard quand j’ai voulu épouser un G.I.
Un fonctionnaire du consulat américain m'a interrogé
Il a refusé mon permis de sortie, a dit que mes réponses n'ont pas montré
Que j'avais tiré ma leçon de la responsabilité.
Ainsi soudainement j'ai été forcé de commencer à penser sur ce thème
Et quand plus tard on m'a permis d'émigrer
On doit m'avoir demandé cent fois où j'étais et ce que j'ai fait
Dans ces années où Hitler a gouverné notre état
J'ai dit que j'étais un enfant ou au maximum un adolescent
Mais cela a seulement prolongé l'interrogation
Ils demanderaient, où étaient mes parents, mon père, ma mère
Et à tout ceci je ne pourrais rien répondre
La graine plantée là à Nuremberg en 1947
Commença à germer et grandir
Progressivement j'ai compris ce que ce verdict m'a signifié
Quand il y a des crimes que je peux voir et que je peux savoir
Et maintenant je sais aussi ce qu'il en est de la culpabilité massive
Une fois dans une vie c’est assez pour moi
Non, je ne pouvais le prendre une deuxième fois
Et c'est pourquoi je suis ici aujourd'hui.
Les événements du 25 mai, le jour de notre protestation,
Je mets un petit contrepoids de l'autre côté
Espérant qu'un jour ma contribution à la paix
Aidera juste un peu à renverser la marée
Et peut-être pourrais-je dire à mes six enfants
Et plus tard leurs propres enfants
Que finalement leur avenir ne doit pas être silencieux
Quand on leur demandera, Où était votre mère, alors ?
Pete Seeger